The Hate U give de Angie Thomas. Nathan, 2018

Seule une auteur noire américaine pouvait écrire avec tant de sincérité et de justesse les discriminations quotidiennes toujours actuelles des populations afro-américaines.

Il est question de racisme, de guerre des gangs, de corruption, de bavure policière, d'injustice, de colère, d'impuissance, de politique, de militantisme, de religion... D'une bataille permanente que Starr doit assumer du haut de ses 16 ans.

Chapeau pour ce roman qui agite les consciences.
Chapeau pour ces personnages à part entière qui ne tombent jamais dans les stéréotypes.

Les quelques longueurs que j'ai pu trouver, je les ai vite oublié pour me plonger dans ce livre engagé avec intérêt et respect.

A lire et à faire lire !

Passionnément, à ma folie de Gwladys Constant. Le Rouergue, 2017

Nous ouvrons le premier chapitre de ce roman sur un drame : on réalise très vite que Gwen est dans une chambre d'hôpital après une tentative de suicide. 
C'est en remontant son journal intime, son carnet écrit au fil des jours, celui qui lui sert de thérapie, que nous comprenons tout de son histoire ;  des rouages de cet amour toxique qui l'a poussé au bout d'elle -même, au bout du supportable.

Manipulée par William, Gwen n'a rien vu venir. Dans ce qu'elle croyait être un conte de fée, elle a perdu son identité, sa dignité, sa personnalité. Aspirée dans le processus d'un pervers narcissique, cette jeune ado nous parle sans concession  de ce qu'elle a vécu et des terribles conséquences.
Si l'écriture l'aide à comprendre le piège dans lequel elle est tombée, les médecins, la famille, les amis seront ceux qui l'aideront à pérennisé sa reconstruction.

Gwladys Constant nous accroche dés le début de l'histoire pour ne plus nous lâcher d'un fil,  sans nous ménager.

Voilà un livre, qui même s'il se termine sur une note d'espoir, reste malheureusement nécessaire en montrant l'isolement des victimes quelles qu'elles soient, leur aveuglement et leur impuissance. 
Une lecture addictive, violente mais fondamentale.

Retrouvez l'avis 

de ma copinaute Pépita

En plein dans la nuit d'Hélène Gaudy. Thierry Magnier, 2011 (réed. 2015)

En plein dans la nuit, c'est l'histoire de Julien, un ado en colère, seul avec son trop plein de rage. Ca bout dans son ventre, ça hurle dans sa tête...  jusqu'au jour où cela explose pour de vrai. 

De nouvelles attaques verbales, aucun soutien des adultes et ça se règle avec des coups de poing en plein milieu de la classe. 

Puis c'est la fuite, un revolver dans la poche, comme une nouvelle énergie pour se venger de ses souffrances, mais aussi celles de son ami Chen. 

L'arme entre les mains, on sent bien que l'issue sera violente. Mais elle est encore plus brutale qu'on ne l'imagine.

Quelle ambiance dérangeante !

Quelle férocité dans les sentiments !

Un livre d'une densité incroyable, comme un choc frontal avec l'univers parfois cruel d'une génération perdue.

Une plongée entre références baroques et violence des images. 

De quoi en rester sans voix.

Wild song de Janis MacKay. Fleurus, 2016

Niilo est un ado blessé, sauvage et en détresse. La colère bout en permanence  au fond de lui et ses excès de violence deviennent  trop fréquents.Ce qui le met dans cet état, on s’en doute mais on ne le sait pas vraiment.

C’est sur une île perdue, dans  une école spécialisée que Niilo va trouver une oreille attentive et petit à petit acquérir un peu plus de sérénité. La relation étonnante avec un éducateur attentionné va vraiment être déterminante pour l’avenir du jeune ado. Il va dépasser ses peurs, commencer à s’ouvrir aux autres, se lier d’amitié, trouver un sens à sa vie, …

Dans la deuxième partie du livre on bascule dans une Robinsonnade, alors que Niilo fugue à la nage vers une île déserte, après avoir vaincu sa phobie de la mer. Cette étape essentielle  vient compléter sa quête identitaire et son dépassement personnel, mal nécessaire pour retrouver sa place dans la société.

Quand la parole se libère enfin, ce véritable récit initiatique nous réapprend la délicatesse, la confiance et l’amour.

Entre conte, mythe et réalité, ce roman nous emporte dans le fin fond des paysages  et des légendes ancestrales des îles finlandaises.

Une couverture qui attire l’œil et qui tient ses promesses pour tous ceux qui souhaitent se laisser transporter dans une nature vibrante, libre et sauvage.

Le faire ou mourir / Claire-Lise Marguier. Le rouergue, 2014

Incompris, mal dans sa peau, ridiculisé, hyper sensible, ... Damien est un ado vulnérable.

S'il n'arrive pas à exprimer son malheur, le seul moyen qu'il ait trouvé pour l'évacuer et de s'entailler le corps. Des blessures profondes, pour laisser le sang s'échapper et la  douleur s'écouler.

Sa route va un jour croiser celle de Samy et de sa bande d'amis. 
Avec eux, Damien se sent bien. Pour une fois, il est écouté, aimé et protégé. Mais ces nouvelles fréquentations ne sont pas du goût de ses parents et pour arriver à grappiller quelques instants de bonheur, Damien va devoir continuer de subir humiliation, mépris et brutalité.

Dense et compact, ce livre est une explosion. Une explosion de colère, de peur, d'amour, de rage, de folie... Il y a toute la violence de la scarification, la rudesse d'un abruti de père mais heureusement aussi, une immense  histoire d'amour. 

Sans rien dévoiler de la fin, ce dénouement en deux temps fait monter la tension à son paroxysme et la dernière page se tourne avec un : " Chapeau, Madame Marguier, pour un premier roman, c'est un coup de maître". 

Puissant et révoltant. 

Quel talent !

Retrouvez l'avis 

de ma copinaute Sophie

Les fragiles / Cécile Roumiguière. Sarbacane, 2016

Il y a des gamins qui commencent dans la vie avec les mauvaises cartes en mains.

Andrew fait parti de ceux-là.

Comment faire ?

Comment faire pour avancer dans la vie quand la figure paternelle est violente, raciste, méprisante ... et que sa mère est trop jeune et trop paumée ?

Comment faire quand les reproches deviennent de plus en plus fréquents car Drew ne correspond pas aux attentes de son père. Trop doué à l'école, pas assez sportif, pas assez viril.

Comment ne pas s'enfoncer dans le mutisme et la mutilation ? 

Comment sortir de cette spirale infernale ? 

Il y bien la belle et jeune Sky, mais elle est si indomptable ! 

Si le drame final est annoncé dés les premières lignes, il nous hante au fil des pages alors que Cécile Roumiguière s'applique à remonter le fil du temps jusqu'au jour où tout à basculé.

Une histoire au sujet complexe et lourd, où chaque personnage apparaît dans toute sa vulnérabilité.

Un roman qui s'appuie sur la réalité d'une société sans céder à la facilité.

Mais au fond, une histoire d'amour brut qui laisse en chacun de nous une certaine amertume et un immense fragilité.

Roméo sans Juliette / Jean-Paul Nozière. Thierry Magnier, 2015

Pourquoi Roméo était-il enfermé dans un centre  éducatif ?

Pourquoi ne veut-il pas rendre visite son père mourant ?

Pourquoi, à son retour,  la mère de son amie Juliette l'accueille  comme un mal propre ?

 

Les voix de Juliette et Roméo se complètent et se répondent entre passé et présent pour nous raconter la dérive d'un père entrainant son fils dans son extrémisme et son homophobie.

Un roman bouillonnant, gênant, chaotique, terrible et saisissant.

Roméo avec Juliette.

Roméo sans Juliette.

Les deux ados se cherchent, se provoquent, se détachent, s'éloignent, se protègent ...  on craint de les voir se perdre définitivement pour mieux se retrouver finalement.

Entre descente aux enfers,  geste irréparable et rédemption, on est bousculé par ce roman dont il est difficile de sortir indemne.

 

Un courant d'air / Laurie Cohen. Alice éditions, 2014

En très peu de pages, Laurie Cohen nous plonge dans l'univers des sans-abris. Plus précisément, dans l'univers d'une jeune femme dont on ne connait pas le prénom et dont on ne sait presque rien. Son passé, on le  devine au travers de paragraphes écrits en italique ponctuant le récit comme des flashbacks. Entre amour et violence, on se doute que c'est lui qui a provoqué sa descente dans la rue.

 

Au quotidien, elle galère. Sa vie est rythmée par le froid, la solitude, l'indifférence, la lutte et la quête d'un minimum de dignité. L'alcool aide à supporter la rudesse des journées et la présence  d'une amie SDF apaise les peurs.

Le style de l'auteur nous percute. Les phrases brèves et les chapitres courts se succèdent et nous emportent dans la rudesse et la difficulté de ce quotidien où la survie est une question de réalité.

Que dire de la fin ?

Brutale, elle nous assomme. L'ombre menaçante du passé ressurgit de plein fouet mais c'est ELLE, qui pour cette ultime fois, aura le dernier mot.

Si l'on en doutait encore, ce roman percutant, noir et tragique nous confirme bien que ce n'est jamais par choix que l'on finit dans la rue.

Un roman qui sonne juste.

Vibrations / Raphaëlle Frier. Talents hauts, 2014.

Clara est scotchée à son portable jour et nuit.  A chacune de ses vibrations elle espère voir s'afficher un SMS de la part du beau Sylvain. Elle attend, elle espère... Entre eux, c'est un jeu de chat et de souris par SMS échangés et dont le contenu est sans équivoque sur leurs sentiments respectifs. Et pourtant dans la cour du lycée, ils se parlent à peine et se croisent de loin.

Très rapidement, on sent la faille, l'étrangeté et l'ambiguïté de cette relation.

Que s'imaginait Clara en attendant impatiemment les SMS de Sylvain ? Qu'espérait-elle de ses messages très déclaratifs, alors que dans la cour du lycée Sylvain l'évite ? Qui est -il réellement ?

Le jour où Clara emporte par erreur le portable de Sylvain et se met à le dépouiller, elle tombe alors sur une vidéo humiliante et raciste à l'égard de son ami d'enfance Hakim tournée par "son prince pas si charmant" et ses copains.

Un texte court, qui aurait mérité de s'y attarder un peu plus. Un texte qui me parait utile et qui pourrait bien interpeller et sensibiliser les ados sur les dangers des illusions, des images, de l'usage de son smartphone, ...
 

Un roman d'actualité à usage pédagogique.

Le contour de toutes les peurs / Guillaume Guéraud. Le rouergue, 2008

Avec Guillaume Guéraud, je le savais déjà, il faut avoir le cœur bien accroché.

Nous sommes ici dans un huis clos infernal d’une extrême violence où un agresseur, complétement  irraisonné, est pris d’une folie meurtrière.

Pourtant, en cette fin d’après midi, Clément rentrait chez lui tranquillement, et ne se doutait pas qu’un homme s’était introduit par effraction dans son domicile. Un inconnu qui a sombré dans la violence par désespoir et qui souhaite se venger d’une décision de justice soutenue par la mère de Clément, avocate. Une affaire familiale sordide où un enfant a laissé sa vie.

Ce livre pose vraiment des questions  tellement le réalisme est fort, voir extremement brutal.  Je pourrais aussi employer les mots de  « cruauté », « calvaire », « sadisme » … un champ lexical qui présage d’une lecture haletante remplie d’inquiétudes, où la plume incisive, crue et directe de Guillaume Guéraud rajoutent quelques sueurs froides.

Un roman sombre et  atypique,  à réserver essentiellement aux grands ados.

Je suis en Chine / Christine Féret-Fleury. Oskar, 2014

Comme d'habitude la collection Court Métrage, nous percute de plein fouet en quelques pages. Le malaise ici  se ressent dés la couverture où un paravent baigne dans une mare de sang.

Violence du thème ; violence des mots pourtant apaisés par la description d'une Chine magnifique où l'imagination de la narratrice s'évade pour lutter contre les cris d'une violence conjugale.

Si les chapitres alternent entre réalité quotidienne et rêve d'ailleurs, malgré tout la tension monte... jusqu'à l'insupportable.

Un roman presque trop court, mais qui n'en est pas pour le moins bouleversant, sur un thème si délicat.