Le pays qui te ressemble / Fabrice Colin. Albin Michel, 2015.

Ca démarre sur les chapeaux de roues ! Très rapidement on adore l'ironie de Lucy, le flegme de son frère Jude, la rock'n'roll attitude de leur père et surtout, Maryline, leur grand-mère fantasque.

Alors, c'est parti, on est prêt à les suivre au bout du monde  dans leur road-movie, une liste des ex-petites amies de leur père entre les mains, en quête de leur mère biologique. 

Zou, direction l'Italie, la Suisse, puis Bruxelles et Oxford (le tout bercé par la musique des Beatles ....Jude et Lucy... vous avez saisi...) pour arriver à Hong Kong.

La première partie est rocambolesque ; on est emporté par l'inventivité des jumeaux, la débrouillardise de la grand-mère et l'arrivée de Simone. Et puis tout d'un coup, le cadre s'installe et le récit pimenté s'assagit. En révélant le but de leur voyage à leur père, tout devient plus sérieux.

Bien sûr, la finalité ne laisse aucun doute mais toute l'aventure est portée par des personnages fabuleux, d'une grande densité, qui sous des traits d'humour pansent leur blessure et laissent éclater leurs émotions pour laisser la vie reprendre le dessus.

Un roman drôle, ... un drôle de roman...

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Dans le baba ! / Edouard Manceau. Albim Michel Jeunesse, 2015

«Arrête de faire ton chef ! », voilà ce que l’on pourrait dire à notre petit héros-commandant-décideur autoproclamé souverain de sa petite bande.

Et à force de parade et d’exigence, forcément, il finit  par se faire détester et délaisser. 

« Et pan ! Dans le baba.», comme il aurait l’habitude de dire.

Renversement de situation et la cour du roi n’est plus du tout d’accord pour obéir au souverain, qui en a perdu sa couronne d’ailleurs !

Avec efficacité, cet album aborde le thème du pouvoir  et de la dominance, parfois éphémère, souvent problématique.

Si le sujet et la chute sont attendus, j'apprécie toujours chez Edouard Manceau  cette capacité à trouver une harmonie entre le dessin et le texte pour destiner ses histoires au plus jeune des publics. 

Un album en toute simplicité et qui sonne juste.

Retrouvez mes autres lectures
d'Edouard Manceau

Bouche cousue / Marion Muller-Colard. Gallimard, 2016

La vie de famille, c'est comme une machine à laver : on tourne ensemble, on s'emmêle, on s'effiloche, on rebondit chacun à son tour au fond du tambour,  ... mais le linge "sale" à parfois du mal à se laver.

Et puis le tri. C'est très important le tri, il ne faut pas que le linge de couleur décolore sur la pureté du traditionnel linge blanc.

Dans la famille d'Amandana, c'est un peu ça. Dans la laverie de ses parents, on se tait quand la machine à laver la vie s'emballe, on ne se mélange pas et on ne veut surtout pas de vague. Tout doit être parfait, rincé, plié, rangé et rien ne doit dépasser.

Ado, Amandana étouffe dans la moiteur de cette atmosphère aseptisée.

Et aujourd'hui, quasiment 15 ans plus tard, le tambour qui tourne semble s'emballer de nouveau. Amandana décide alors d'adresser une lettre ouverte à son neveu Tom, pour revenir avec lui sur un passage douloureux de sa propre adolescence : l'acceptation de certains baisers serait bien plus intelligente que de coudre des bouches. 

Un roman sincère et intime, d'une grande qualité d'écriture et d'une réflexion nécessaire.

Retrouver l'avis de ma copinaute 

Céline du Tiroir à histoires

Jimi-X / Louis Atangana. Rouergue, 2015

C'est une histoire d'abandon, de souffrance et de violence.

Toute une trajectoire chaotique, misérable où il faut tenter de survivre.

Mais faut-il en passer par là pour que le génie se révèle ?

Parents alcooliques qui se déchirent, porte monnaie vide, incompréhension des autres et mêmes des siens, manque d'amour... il lui en faut de la volonté au petit Jimi pour que la musique remplisse son vide, remplisse sa vie.

C'est l'histoire d'une légende, une légende exceptionnelle  au parcours dense pour une vie trop courte. 

Un roman éclairant et envoûtant.

Ce que j'ai aussi lu

 de Louis Atangana

Mon amour / Astrid Desbordes, Pauline Martin. Albin Michel jeunesse, 2015

Quel enfant n'a jamais douté  de l'amour de ses parents, et de sa mère en particulier ? 

Archibald ne déroge pas à la règle, et au moment du coucher, cherche à être rassuré.

Alors posément, tout en tendresse et en sincérité, maman lui apporte des réponses. A partir de situations concrètes, elle démontre par l'exemple et le contre-exemple, que quoi qu'il arrive elle sera toujours sa maman, il sera toujours son enfant et que rien n'altérera son amour.

Plus fort encore, cet album va plus loin que l'amour fusionnel,  il coupe le cordon ombilical et aborde l'éloignement et l'inévitable séparation. 

Cet album ne parait pas édifiant et pourtant, comme il est bienveillant ! 

Un petit bijou précieux pour avancer dans la vie du bon pied. Une déclaration d'amour par tous les temps, pour tous les âges.

Un album rassurant et fortifiant.

Retrouvez l'avis de mes copinautes Bouma, 

de Céline et de Chlop

Dans de beaux draps / Marie Colot. Alice Editions, 2015.

Quand dans la famille recomposée, débarque un jour, Rodolphe, un demi-frère mystérieux et beau comme un dieu, il suffit d'un doigt qui ripe pour que Jade poste une photo sur Facebook et le présente comme son petit ami. 

La spirale commence alors : dans l'excitation de sa popularité qui augmente, Jane alimente son mensonge, mais très vite elle est victime de jalousie et d'insultes  et il n'y a qu'un pas, rapidement franchi, vers de la violence physique.

Dans ce récit construit, Marie Colot, interpelle sur les dangers des réseaux sociaux mais sait aussi habilement aborder l'adolescence, l'image de soi, la vision de la famille et les questions d'amitié. Jade ressemble à une ado "ordinaire", un peu mal dans sa peau, qui cherche sa place et qui croit la trouver en voulant 'pimenter' son quotidien. 

Une réflexion juste sur le mensonge et le besoin d'exister sur le web.

Une histoire bien ancrée dans une réalité, efficace et qui saura sûrement trouver une résonance chez les adolescents d'aujourd'hui. 

Mes autres lectures

de Marie Colot

Signe distinctif roux / Anouk Bloch-Henry. Oskar, 2015

Il est habitué, Harold, à la bêtise et aux moqueries des autres. 

Depuis toujours, il porte sa rousseur comme un fardeau, il sait qu'il doit jouer des coudes et que dans ce nouveau collège, comme ailleurs, il devra serrer les dents. 

Se poser en victime ? 

Réagir ? 

Baisser les bras ?

Mais très vite, il fait la connaissance d'Axelle qui va de suite l'intégrer dans son groupe d'amis. Ce qui n'est pas du goût de Mathieu, le petit ami d'Axelle, qui va alors transformer la vie d'Harold en enfer, entre blagues à deux balles et insultes médiocres sur ses cheveux roux.

Pourquoi je ne me suis pas attachée à Harold ? Je ne sais pas ... Comme une impression que tout va trop vite et se dénoue facilement. 

Victime d'un harcèlement terrible, Harold passe par toutes les phases de la souffrance, de l'espoir, du renfermement ... il s'entoure de haine, d'amour, de jalousie, ... mais c'est presque un peu trop pour un si petit nombre de pages. 

Alors bien sûr un roman d'utilité pédagogique qui va à l'essentiel, mais qui, pour moi, manque d'intrigue.

Cette nuit-là / Rémi Courgeon. Mango, 2015

Les nuits se suivent et ne se ressemblent pas ... 
Chacune raconte sa propre histoire et garde au plus profond d'elle les secrets de chacun. 
Ceux qui ne dorment pas vivent leur autre vie, plus sereine, plus poétique.

L'astre, lui, veille.  Et petit à petit, d'un mince croissant, la lune devient pleine et entame son autre révolution. Toujours proche, jamais loin, la lune s'invite dans les rêveries et les doux plaisirs de chacun.

Whaouah !

Tant sur la forme que sur le fond ;  rien à dire, tout se complète, se répond, se correspond... et l'on plonge avec délectation dans cet univers naïf et onirique.

Très peu de texte, très peu d'illustrations pour un livre réussi qui forme un tout, et qui traduit l'univers si bien inspiré de Rémi Courgeon,... nuit après nuit, lune après l'autre ...

D'autres titres 

de Rémi Courgeon

Billie Lou / Sarah-Maude Beauchesne. Keenes, 2015.

L'adolescence est cette période où l'amour est dans l'air.

Sentiments naissants, papillons dans le ventre, mélange des émotions, ...

Billie-Lou, elle, est tombée amoureuse d'un beau cycliste, bien blond et bien musclé. De quoi faire chavirer son coeur, ...mais le briser aussi.

Il y a toute la période de séduction, les baisers fougueux, la naïveté, la maladresse, ... c'est tout ça l'amour adolescent ; aussi lumineux que dramatique !

Encore enfant, à peine femme Billie-Lou est pleine de contraste et d'attente. Elle espère sa première nuit d'amour jusqu'à l'obsession. Un peu trop sûrement pour que cela n'agace pas la (vieille) lectrice que je suis, par moment. 

Avec un tel thème, un roman qui s'adresse essentiellement aux jeunes adolescentes. Y trouveront-elles des similitudes avec leurs questionnements  ?

Si nous avons là, toute la substance du livre, pour ma part, j'ai adoré la relation de Billie avec sa soeur :  de l'amour, de l'admiration, de la confidence, de la jalousie aussi... tellement vrai !

Alors, j'ai peut-être un peu passer l'âge pour cette lecture, mais Billie Lou,  il te reste tellement de chose à découvrir !

Dix jours sans écrans / Sophie Rigal-Goulard. Rageot, 2015

Que faire quand la maîtresse propose 10 jours sans toucher à sa tablette, sa console, son ordinateur, la télécommande de sa télé ...? 

Dans la classe il y a ceux qui sautent de joie, car c'est déjà plus ou moins une pratique parentale et, à l'inverse, ceux qui organisent une campagne  de lutte contre ce projet.

Mais finalement qui tiendra le coup ? Qui seront les moins accros ?

Chaque chapitre alterne les points de vue et les évolutions de différents élèves pour mieux mettre en perspective l'enjeu de cette initiative, et le message passe plutôt bien !

Dans la bonne humeur, sans employer un ton moralisateur ou pédagogique, ce petit roman invite juste à prendre le temps de se poser des questions et à regarder autour de soi.

Une lecture facile et enjouée sur un thème d'actualité.

Yasuké / Frédéric Marais. Les fourmis rouges, 2015

Les albums grands formats de Frédéric Marais sont prometteurs dés leurs couvertures.

Ici encore, comment ne pas être interpellé par cette vague puissante, cette écume blanche se détachant sur le fond vert turquoise, alors qu'au fond un bateau semble poursuivre sa route contre vents et marée.

Nous sommes prêts, le Japon nous appelle, partons en voyage ...

Pas de mystère sur la genèse de cet album qui raconte l'histoire (vraie) de Kuru-san Yasuké, esclave africain devenu samouraï  au XVI° siècle.

Si le texte est succinct et sobre, les illustrations sur double page apportent une force graphique indéniable. Elles se laissent contempler pour mieux plonger dans ce voyage initiatique :  l'itinéraire exemplaire de ce jeune africain qui cherchait juste un prénom.

Le style de Frédéric Marais est toujours remarquable et sans nul autre pareil.

Un album singulier, qui attise la curiosité. 

Un album fort et puissant : magnifique !

D'autres titres de

 Frédéric Marais

Le frère de Simone / Eva Kavian. Oskar,2015.

Elle a une revanche à prendre sur la vie, Simone.

18 ans, orpheline, elle doit élever son petit frère Fred et souhaite à tout prix se donner les moyens d'avancer dans ses études pour un avenir meilleur.

C'est l'as de la débrouille : elle se retrouve chez son cousin, dans une ville inconnue, l'aide au magasin, assure la gestion et l'intendance de la vie de son petit frère tout en dressant autour d'elle de hautes barrières secrètes.

Ne pas se faire d'amis, ne rien dire de son passé et avancer ; c'est son choix. 
Elle veut réussir, brillamment, avec l'enjeu d'un oubli et d'une réparation possibles.

Entre réalité du quotidien, indices d'un passé douloureux et plongées dans l'imaginaire fantaisiste de Fred qui cherche à comprendre ce qu'il fait là, ce roman n'est pas simple. Ni sur la forme, ni sur le fond. 

Et pourtant, c'est une lecture subtile, touchante et pleine d'espoir. Tout n'est pas dévoilé, quelques frustrations planent mais l'essentiel est dit.

Une leçon de générosité et d'humanité qui longtemps résonne ... 

L'art et la manière d'Eva Kavian pour aborder 

des sujets douloureux toujours vibrants